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DE DIENNÉ À TOMBOUCTOU

patrie première, j’espère qu’il se trouvera parmi les commandants d’El-Oual-Hadj un esprit assez curieux pour demander au monticule son secret.

Depuis Saréféré le voyage, si intéressant par ses tableaux variés, offre encore l’attrait d’un drame de la nature : la lutte du Niger et du Sahara, le combat de la vie contre la mort, l’assaut de la fertilité contre la stérilité. On perçoit très distinctement les efforts que le fleuve géant oppose aux sables. Les coups qu’il leur porte se marquent en vertes taches : prairies, plaines de cultures, rizières, arbres. Ceux qu’il en reçoit, peu nombreux tout d’abord, se détachent scintillants et crépitants de blancheur, — dunes qui éblouissent l’œil sous l’éclatant soleil. De loin en loin elles se frayent un chemin à travers les verdures vivaces et viennent brusquement mourir sur le bord du fleuve. Le spectateur est averti : le domaine des eaux va finir. Le royaume des sables n’est pas loin.

Cependant Tombouctou approche. Le Niger faiblit. Au lieu de marcher de sa franche allure vers le nord, doucement il s’infléchit vers l’est. Les sables redoublent leurs attaques. À l’ouest, sur la rive gauche, leurs masses apparaissent de plus en plus nombreuses. En chaînes elles suivent à distance le géant, le surveillent, s’approchent. Décidément il cède : elles sont trop qui pointent blanches à travers les verdures vivaces, les dunes.

À quelques heures de Tombouctou se déroule la dernière scène du drame. Voilà qu’à droite l’horizon s’agrandit démesurément. Une plaine d’eau se dessine à l’est. Résolument le Niger cède le nord aux sables, et presque à angle droit, se retire dans la direction du lac Tchad. Il se retire du reste avec tous les honneurs de la guerre, en retraite et non en déroute. Pour protéger sa marche il détache un