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TOMBOUCTOU LA MYSTÉRIEUSE

non seulement le respect, mais même l’obéissance. C’est ainsi que bien des gens n’eurent jamais d’autre règle de conduite que les préceptes sortis de sa bouche.

« On venait en foule lui demander sa bénédiction et apporter des cadeaux considérables. Il recevait les visiteurs avec modestie ; quant aux présents, il les offrait à d’autres personnes.

« Ayant été nommé cadi, il fit disparaître les abus et la corruption qui environnaient les tribunaux : alors surtout grandit sa renommée qui le posa comme un modèle d’équité aux yeux des vrais croyants.

« Cependant les devoirs si pénibles de la magistrature furent incapables d’attiédir le dévouement du professeur. Il avait débuté par l’enseignement et continua d’enseigner étant cadi. Et quel charme pour ceux qui écoutaient ses leçons ! Quelle lucidité dans ses explications ! Quel guide sûr et facile que sa méthode ! Un talent si accompli n’était-il pas fait pour opérer une révolution dans les études ? Sidi Yahia vivifia la science dans le pays des nègres, et il instruisit une foule de Jeunes gens qui, plus tard, se distinguèrent eux-mêmes dans les lettres. Deux générations furent ainsi formées. Sa vie fut, en effet, aussi longue qu’utile. Il vécut quatre-vingt-sept ans (1373-1462) et professa une cinquantaine d’années. »

C’est une superfétation de dire que de si savants personnages devaient posséder de merveilleuses bibliothèques. L’on en trouve le catalogue dans les auteurs soudanais. Les ouvrages religieux, juridiques et grammaticaux tenaient la première place. C’étaient : des recueils de traditions du Prophète comme le Sahib de Bokhari, le Djané d’Essoyouti, le Sabib de Moslin ; le Sogra, ce pieux ouvrage dont un marabout disait qu’ayant été transporté en rêve dans le paradis, il y avait vu Abraham, l’ami de Dieu, l’enseignant aux enfants et le leur faisant copier sur des planchettes ; des traités de grammaire comme l’Alfyga ; des ouvrages ayant trait à Mahomet,