Page:Dubois - Tombouctou la mystérieuse, 1897.djvu/90

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
74
TOMBOUCTOU LA MYSTÉRIEUSE

tout le Soudan et dans le Désert on ne se sert d’autres graisses les alimentaires ; les grands blocs blancs de karité ont sur toutes autres graisses l’avantage, inestimable en pays chaud, de ne pas se corrompre.

L’Européen utilisera certainement le karité d’une manière plus profitable encore. En attendant d’être fixé sur le parti à en tirer, une utilité lui est assurée déjà, et infiniment précieuse : l’arbre de karité donne par incision, ainsi que s’obtient la résine des pins, un produit que l’industrie recherche à l’heure actuelle avec une véritable anxiété, car il se raréfie à mesure que la consommation augmente, la gutta-percha.

Dans le voisinage du karité, aussi peu cultivé et respecté que lui, se trouve généralement une autre curiosité végétale, le nété. Après l’arbre à beurre, voici l’arbre à farine. Celle-ci, qui est en vente sur tous les marchés de la région, se trouve enfermée dans de grandes gousses. Elle est de couleur jaunâtre et très riche en sucre, si bien que j’en ai vu employer par des Européens à la confection de pâtisseries.

L’appoint que le nété fournira à l’industrie occidentale ne saute pas encore aux yeux. On n’en saurait dire autant d’un troisième arbre, très fréquent aussi dans ces régions, le fromager. Non pas que dame Flore, après avoir bénévolement pourvu les nègres de beurre et de pâtisserie, se soit ingéniée à faire venir sur les branches de cet arbre des petits-suisses, des livarots ou des camemberts. Le fromager (Baga ou Bamanbi, pour les indigènes) produit des capsules d’où s’échappent de très fins et très brillants filaments blancs auxquels on a donné le nom de « soie végétale », tant ils ressemblent aux précieux fils du cocon. Du reste, le fromager n’est pas seul, au Soudan, à produire ce miracle : le follicule d’une anémone très commune est également plein d’une soie lustrée, et dans le deuxième delta