Aller au contenu

Page:Ernest Renan - Le livre de Job, Calmann-Levy, 1860.djvu/141

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

S’agit-il de force, il dit : « Me voilà ! »
S’agit-il de droit, il dit : « Qui m’assigne ? »

Je serais juste que ma bouche même me condamnerait[1],
Je serais innocent qu’elle me déclarerait pervers.



    Oui, je suis innocent ; peu m’importe l’existence,
Je ne tiens plus à la vie[2].

Tout se vaut ; c’est pourquoi j’ai dit :
« Il fait périr également le juste et le coupable. »

Oh ! si du moins il me tuait d’un seul coup !
Mais il se rit des épreuves de l’innocent.

La terre est par lui livrée aux mains des scélérats.
Il voile la face de ceux qui la jugent :
Si ce n’est lui, qui donc est-ce ?
 

  1. Job, par une hyperbole hardie, soutient que, s’il plaidait contre Dieu, sa bouche même le trahirait et dirait le contraire de ce qu’il veut dire.
  2. Job désespérant de faire triompher son droit contre Dieu, se laisse aller à un violent mouvement de colère, et proclame hautement son innocence, au risque de recevoir la mort pour prix de son audace.