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la danse macabre


Et de partout monter ces feux multicolores,
Pourquoi sans bruit partout des prunelles éclore,
Et se distendre, et m’épier ? pourquoi ces fleurs,
Ces feux encor, ces blêmes tremblements sonores ?
C’est sans doute un présage et signe que je meurs.

Puis voici exploser à d’infinies distances,
D’indistincts océans d’étoiles, flots lactés
Où je sens m’emporter dans l’éternel silence
Une chute durant depuis l’éternité.

. . . . . . . . . . . .



On s’habitue à tout, s’acclimate au vertige,
La démence au dément devient état normal :
Serais-je un dément ? même un vivant ? où bien suis-je,
Hors déjà de la vie, un mort qui rêve mal ?

L’écœurant tourbillon s’enfle comme une trombe,
Il vient, se précipite, accourt en ouragan,
Il emplit tout l’espace, il m’aspire, je tombe,
Fétu vivant qui tremble aux lèvres du torrent ;

Tout s’accélère, ô nébuleuse dévorante !
Des rumeurs, des lueurs qu’on ne peut définir,
Des gammes d’arc-en-ciel, d’étranges fleurs qui chantent :
Est-ce le Paradis et vais-je enfin mourir ?

À nouveau tout chavire, astres et fleurs, tout sombre ;
En place des parfums, des chœurs que j’entendis,

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