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DESCARTES.

beauté, mais identique à la vérité même, parfaitement indépendante de ce qui peut plaire ou déplaire à nos sens. La beauté d’un paysage, en tant qu’elle résulte de couleurs, de sons, d’apparences sensibles qui nous charment, est nécessairement en nous, puisque tout ce qui la compose n’est qu’en nous. Le fond réel de la beauté est mathématique : les sons qui nous ravissent sont ceux qui ont entre eux des « rapports simples » ; le plaisir n’est qu’une idée « confuse » où nous percevons vaguement une géométrie cachée.

Restent ces fameuses causes efficientes et ces causes finales qui, sous diverses formes, faisaient l’objet de la spéculation antique et scolastique. Ici, Descartes est impitoyable. Il bannit d’abord du monde extérieur toutes les forces, même les forces motrices, qui ne sont pour lui que des mouvements actuels. La force, c’est le mouvement intestin et invisible d’où le mouvement visible de masse peut sortir, sous certaines conditions mathématiques. Descartes ne se contente pas de proscrire du monde physique la « force » ; c’est encore la « cause » même qu’il remplace par des rapports mathématiques. Faisons-y attention, le principe de causalité a deux sens possibles : ou il désigne la cause efficiente, c’est-à-dire une puissance active, une « efficace », d’où l’effet sortirait comme par génération, ainsi que l’enfant du ventre de sa mère. C’est là ce que chacun croit apercevoir en soi-même quand il fait effort pour atteindre un but. Mais y a-t-il, aux yeux de la science, rien de semblable dans le monde exté-