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ISOLINE

ses cheveux que la brise éparpillait. Elle traversa le village, noir, sordide, sa robe relevée sur le bras, sautillant sur les pavés gras, puis elle descendit un escalier de pierre près d’un ruisseau où des femmes lavaient, et elle se retourna avec un regard souriant vers son compagnon qui ne s’était pas laissé distancer.

— « Maintenant, à l’assaut ! » s’écria-t-elle en désignant une colline abrupte sur laquelle se dressaient trois grosses tours démantelées.

Gilbert s’élança et, en quelques instants, disparut à ses yeux. Elle était leste pourtant et grimpait, comme la chèvre sa nourrice, sur les pierres branlantes et les sentiers à pic ; mais elle ne put le rejoindre et lorsqu’un peu dépitée, les joues roses et le cœur bondissant, elle arriva au faîte du mont, elle ne le vit nulle part.

Il y avait des abîmes béants où les murailles de la forteresse s’étaient affaissées, les hérissant de pierres sans les combler tout à fait. L’herbe, les ronces, les fougères, formaient dans ces creux un rideau mouvant capable de se refermer sur un corps broyé.

Isoline eut peur. Certainement il avait glissé,