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358 GAZETTE DES BEAUX-ARTS pcreur. Àndronic II aimait les lettres; il s’entourait volontiers de savants; « son palais, dit un contemporain, était le champ clos des langues éloquentes. » Près d’un tel souverain, Métochitc devait réussir. Ce fut pour lui la source d’une fortune qui dura presque autant que sa vie. Au physique, Théodore Métochite était un fort bel homme : à la cour on l’appelait volontiers « le beau Métochite ». 11 était grand, bien fait, élégant; des yeux, rieurs illuminaient son visage; il avait une physionomie avenante et joyeuse, un air aimable, que tempérait à peine une certaine gravité un peu voulue. Fort intelligent avec cela, d’esprit vif et ouvert, il avait une grande abondance d’idées et une éloquence naturelle pour les exprimer. Sa puissance de travail était prodigieuse, sa curiosité toujours en éveil, son érudition admirable, sa mémoire fidèle autant que précise. Les contemporains, ses amis aussi bien que ses adversaires, s’accordentà faire son éloge. « C’était, dit l’un, une bibliothèque vivante, toujours prête pour qui la voulait consulter » ; c’était, dit un autre, « THélicon des Muses, le loyer de l’éloquence, le sanctuaire de la philosophie, et, pour tout dire, le prytanée de la science. » Au vrai, c’était un homme universel. Pro¬ fondément nourri de la culture antique, il fut tout à la fois historien, orateur, poète; mais, plus encore, il aimait la philosophie. U goûtait Arislote et davantage encore Platon : il a écrit quelque part que « quiconque ne tient pas pour chose admirable la sagesse de Platon et d’Aristote est proprement un fou. Car ce qu’ils ont écrit, comme on le disait jadis des oracles de la Pythie, suffit à tout résoudre, et il n’est pas besoin d’en chercher davantage. » Il cultivait aussi les sciences, les mathématiques, surtout l’astronomie. 11 avait quarante-trois ans déjà quand il s’y appliqua; il n’avait reçu, pour s’y former, que des leçons assez médiocres; telle était pourtant la supériorité de son génie qu’il devint vite, en cette science, l’un des premiers de son temps, et qu’il sut, en un siècle où il y avait tant d’astrologues, être, lui, un savant véritable. Enfin il songeait à réformer la langue, à la ramener à la pureté antique : «Par la race et la langue, disait-il, ne sommes-nous point les compatriotes et les héritiers des anciens Grecs? » En fait, dans cette dernière tentative, il réussit assez mal : peu de styles sont plus compliqués, d’une allure plus confuse, d’une intelligence plus difficile que celui de Théodore Métochite. Ce savant homme était un esprit libre. Quoiqu’il fût très pieux, il ne pensait point qu’entre la science et la foi il y eût nécessai¬ rement antagonisme. Pourtant, cette grande intelligence avait