Page:Gazette des Beaux-Arts, vol 31 - 1904.djvu/537

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AU GAZETTE DES BEAUX-ARTS usuels une vraisemblance, une réalité, un relief extraordinaires; ici les dons du coloriste arrivent à une telle intensité d’expression, que la peinture semble n’avoir jamais mieux manifesté la puissance d’animation du génie humain. De M. Cézanne est venu le penchant, aujourd’hui si répandu, à exprimer pleinement la beauté, la vie de la matière, et le Salon d’automne n’échoue pas à montrer comment MM. Pierre Laprade, Üeborne, Boudot-Lamotte savent la satisfaire. Une synthèse neuve y concilie l’emploi du ton simple, de la touche à larges méplats avec le principe des colorations claires, vibrantes; elle est familière à un groupe d’anciens élèves de Gustave Moreau : MM. Marquet, Matisse, Camoin, Bréal, Manguin, qui tendent parallèlement au style; on en rencontre encore de topiques exemples chez M. Seyssaud, M. Jean Puy et chez M. Sue, l’auteur d’un portrait de femme en robe bleue et d’une Vénus qui demeurent parmi les peintures les plus significatives et les mieux venues de l’exposition. Qu’est-ce à dire, pour le surplus, si ce n’est que le révolutionnaire a fait œuvre de classique ? A l’instant où l’analyse, trop subtile peut-être, des ambiances induisait à la complication des procédés, il a préconisé la simplicité chère aux maîtres d’autrefois ; il a ramené de vive force à l’amour de la belle matière et aux maies franchises d’une pratique robuste et saine. 11 A l’encontre de l’habitude reçue, le groupe qui devait remplacer les impressionnistes victorieux aux avant-postes de l’art se garde bien de nier l’œuvre et le lustre de ses devanciers; il lui paraît plutôt qu’un parti ignoré peut être tiré des acquisitions récentes, L’appellation de « symbolistes », sous laquelle on a désigné ses membres, n’a pas été sans longtemps leur nuire; elle a favorisé une confusion avec les décadents littéraires, fâcheuse et inexacte, de tous points. Ce n’est pas le moment de vérifier dans quelle limite le terme réussit à définir certaines aspirations de l’art moderne; nous nous y sommes essayé jadis ici même, et, depuis, le pauvre Emile Gallé a écrit sur la question des pages définitives qui l’éclairent ou plutôt la résolvent*. Dès à présent, deux lois semblent se dégager de la doctrine symboliste : 1° la prédominance de l’expression et de la Voir notre Salon de 4895 dans la Gazelle des Beauaj-Arts, et Le Décor symbolique, par Emile Gallé.