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496 GAZETTE DES BEAUX-ARTS demeurer à Paris; mais Swebach avait toujours eu l’esprit aventu¬ reux. Les légendes de fortune amassée en Russie par Falconnet et tant d’autres, le bruit des succès de Doyen auprès des boyards, eurent vite raison de ses hésitations. Il s’installa donc à Saint-Pétersbourg. Son existence se passait à dessiner des aquarelles qui s’enlevaient à prix d’or, à faire des visites aux amateurs et à les recevoir. Chaque année, il prenait deux ou trois mois de repos réclamés par l’affaiblis¬ sement de sa santé1. C’étaient des vacances consacrées à son logis parisien de la rue Notre-Damc-de-Nazareth, où l’attendaient des lettres qui le pressaient de céder quelque Halte de soldats, quelque Combat de cavalerie2. D’ailleurs, sa vogue persistait, et on rencontrait à chaque Salon, en dépit de son éloignement, trois ou quatre de ses toiles. À Saint- Pétersbourg, il ne négligeait pas ses carnets, qu’il remplissait de types de moujicks, de silhouettes de cosaques, d’isvochicks dans toutes les tenues possibles. Non par fantaisie d’artiste, mais en sage admi¬ nistrateur de ses talents, il prenait croquis des diverses sites du grand empire du Nord. C’était autant de sujets de tableaux ou de motifs de planches en réserve pour l’avenir. Cependant sa santé, déjà fort ébranlée par un travail opiniâtre, payait tribut au rigoureux climat de Saint-Pétersbourg. 11 fallut revenir; 4 000 francs de rente, d’innombrables cadeaux et la croix de chevalier de Sainte-Ànne de 3e classe, sans compter une situation promise à son fils Bernard-Édouard, qui l’avait aidé dans la compo¬ sition de ses aquarelles, tels étaient les avantages procurés par son ■ séjour à la cour des tsars3. 1. On a une volumineuse correspondance adressée de Russie à Louis Larcher de Saint-Vincent pendant les années 1819-1820. Swebach, après de fréquèutes lamentations sur l’indifférence première des courtisans à son égard et sur sa mauvaise santé, finit par se féliciter du bon prix auquel il parvint à vendre ses tableaux. Ceux qu’il n’échange pas contre espèces sonnantes, il les « troque contre de belles pierres gravées et beaux camées antiques et autres bijoux et curiosités de facile transport ». 2. V. dans Nouvelles Archives de Van français, 2° série, t. II, 1880-81, p. 299, le billet d’un amateur de iNarbonne s’informant du prix d’un des tableaux de format moyen, tenus en réserve par Swebach pour faire face aux sollicitations imprévues. 3. La correspondance entretenue avec Larcher de Saint-Vincent nous montre dans Swebach l’homme pratique qu’il fut durant toute son existence. Presque point de lettre où il ne parle de ses « bonnes affaires », où il ne se vante « d’aller de fêtes en fêtes ». Il rapportait, de son propre aveu, « GO.000 francs, 23.000 à 30.000 francs d’objets précieux », des cadeaux de toute sorte : des bagues antiques, camées, pierres gravées et autres, des collections de pierres précieuses, etc. Il