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SAINT IRÉNÉE.

mi ces créatures, il en est à qui sa munificence infinie a accordé le privilége de se développer en perfection, et de mériter, par une longue persévérance dans le bien, de partager la gloire de l’être incréé ; mais ces créatures, quoique arrivant à la gloire de l’être incréé, n’en ont pas moins été créées ; elles ne doivent qu’à la munificence de Dieu, qui les récompense de leurs vertus, de jouir de ces avantages. Dieu, bien qu’il élève quelques-unes de ses créatures jusqu’à lui, n’en conserve pas moins sa toute puissante suprématie ; il est toujours le seul avant tous et l’auteur de toutes choses, qui restent toujours placées sous sa dépendance. L’obéissance intelligente à Dieu nous fait mériter l’immortalité ; et l’immortalité est la gloire de l’être incréé ; c’est par cet ordre, par cette hiérarchie et ces métamorphoses, que l’homme, tout créé qu’il est, devient l’image et la ressemblance du Dieu incréé. Le Père veut et commande, le Fils exécute et crée, l’Esprit conserve et perfectionne ; et l’homme, s’avançant peu à peu vers la perfection sous ces divins auspices, y touche enfin et se rapproche de l’être incréé. Or, le parfait absolu, c’est l’incréé, c’est-à-dire Dieu. Il fallait donc que l’homme commençât par être créé, qu’ensuite il prît de l’accroissement et se fortifiât ; il fallait qu’arrivé à sa force il se multipliât, puis, que toutes ces parties de lui-même arrivassent à leur perfection ; enfin la perfection lui donnait la gloire éternelle, et elle-même le rendait capable de voir son Créateur ; car voir Dieu est une gloire ; et la vue de Dieu confère le don de sainteté, et la sainteté approche l’homme de Dieu.

Ils se montrent donc dénués de toute raison ceux qui ne veulent pas attendre le temps du développement naturel de toutes choses, et qui imputent à Dieu l’infirmité de leur propre nature. Ceux-là ignorent Dieu, ils s’ignorent eux-mêmes ; ambitieux et ingrats, ne voulant pas être ce qu’ils ont été faits, mais franchissant les lois mêmes assignées au développement de l’humanité, ils voudraient, avant d’être des hommes, devenir semblables à Dieu, leur créateur. Ils ne veulent pas qu’il y ait de différence entre l’être créé et l’être in-