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SAINT IRÉNÉE.

royaumes, car ils me sont livrés, et je les donne à qui je veux ; toi donc, si tu veux m’adorer, tout sera à toi. » Jésus alors, pour lui montrer qu’il savait qui il était, lui dit : « Satan, il est écrit : Tu adoreras le Seigneur ton Dieu, et tu ne serviras que lui seul. » Ainsi, par ces mots, il le dévoile et lui rappelle qui il est lui-même ; car le mot satan, en hébreu, signifie apostat. Le Christ vainquit donc encore une troisième fois le tentateur ; alors, sa défaite étant entière et assez complète, il le repoussa loin de lui. Ainsi le péché commis par Adam par la transgression du commandement de Dieu fut expié par l’obéissance du Fils de l’homme et par sa fidèle observation du précepte divin.

Or, quel est donc ce Seigneur Dieu à qui le Christ rend témoignage, qu’il n’est pas permis à personne de tenter, que tous doivent servir et adorer ? Il est évident que ce Dieu n’est autre que celui qui a donné la loi. Car ce précepte était contenu dans la loi, et le Christ, en l’invoquant, fait voir que la loi porte en elle-même les manifestations du Verbe, qui procède du Père, et en même temps, par cette invocation de la loi, il confond l’ange rebelle, il le dévoile, et il triomphe de lui, en gardant fidèlement, comme Fils de l’homme, le commandement de Dieu. L’homme n’était tombé au pouvoir du démon, dans les premiers jours de la création, que parce qu’il s’abandonna à la tentation et viola l’ordre de Dieu ; la domination du démon avait donc pour cause la transgression et l’apostasie, et c’est ainsi qu’il avait enchaîné l’homme. Il fallait donc que le démon fût à son tour vaincu par l’homme, et qu’il fût chargé des mêmes liens dont il l’avait chargé lui-même, pour que l’homme revînt à Dieu, abandonnant au démon ses chaînes (c’est-à-dire le péché) qui l’avaient retenu captif. Car la défaite du démon a été la victoire pour l’homme ; et, en effet, « comment quelqu’un peut-il entrer dans la maison du fort, et enlever ce qui lui appartient, s’il n’a auparavant lié le fort ? Et alors il pillera sa maison. » Ainsi, le Christ démasque le tentateur et ses ruses en lui montrant et lui opposant la loi de l’auteur souverain de toutes choses ; il le somme par