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SAINT IRÉNÉE.

du Dieu son père : car une erreur n’est pas capable de détruire une autre erreur, de même qu’une tache ne saurait effacer une autre tache. Si donc la loi était une loi entachée d’ignorance et de souillure, comment ses préceptes auraient-ils pu avoir la puissance de triompher de l’ignorance du démon, et de vaincre le fort ? Celui qui est fort ne saurait être vaincu, ni par un plus faible, ni par celui qui est d’une force égale à la sienne ; il ne peut être vaincu que par un plus fort que lui. Or, le plus fort de tous, c’est le verbe de Dieu, lui qui est proclamé dans la loi, par ces paroles : « Écoute, Israël, le Seigneur notre Dieu est seul Seigneur. Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de toute ta force. Tu n’adoreras que lui, et tu le serviras seul. » Or, dans l’Évangile, c’est avec les mêmes préceptes que le Christ a détruit l’empire du démon ; c’est par la voix du Père qu’il triomphe du fort ; et il reconnaît que les enseignements qu’il nous donne sont tirés de la loi elle-même, quand il nous dit : « Il est écrit, tu ne tenteras point le Seigneur ton Dieu. » C’est donc avec la propre loi du Père, et non point avec celle d’un autre, qu’il a vaincu son adversaire et enchaîné le fort.

Ainsi, délivrés de l’esclavage du péché, nous devons, comme le Christ nous l’enseigne, nous nourrir, quand nous avons faim, de cette nourriture qui vient de Dieu. Mais quoiqu’élevés à la perfection et comblés de toutes grâces, enrichis des œuvres de justice, et ornés de tous les dons de l’Esprit saint, nous devons bien prendre garde de nous énorgueillir et de tenter Dieu, mais au contraire, nous humilier en toutes choses et avoir toujours présent à l’esprit le précepte : tu ne tenteras pas le Seigneur ton Dieu ; et comme nous dit l’apôtre : « Ne nous élevant pas à des pensées trop hautes, mais consentant à ce qu’il y a de plus humble ; » ne pas nous laisser aller non plus à l’amour des richesses et de la gloire du monde, et à l’attachement des choses présentes. Nous devons toujours avoir présent à la pensée que c’est pour nous un devoir d’adorer Dieu et ne servir que lui seul ; qu’il ne faut pas prêter l’oreille aux suggestions de l’esprit malin, qui promet faussement de don-