Page:Gobineau - Mademoiselle Irnois - 1920.djvu/101

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goût pour Cabarot, depuis la visite du conseiller d’État chez le jeune tourneur. M. Irnois en avait tiré la conséquence que sa fille n’était pas fâchée de se marier ; et Mlles Maigrelut abondèrent dans son sens, en déclarant qu’après tout il n’était pas désagréable de devenir comtesse et grande dame. Mme Irnois seule, à demi éclairée par un instinct qui fait le mérite et la gloire de la sarigue, concevait des doutes et même des inquiétudes graves. Emmelina, encore une fois, ne s’occupait de rien, et passait toute sa journée à sa fenêtre, occupée à regarder l’artisan.

Voici la fin de l’histoire qui approche ; je voudrais lui enlever toutes les apparences du mélodrame. Le mélodrame n’est pas vrai, la vérité seule est triste.

Le matin du jour marqué pour le mariage, Cabarot arriva de très bonne heure avec ses témoins. M. Irnois avait convoqué les siens, deux hommes de son espèce. On se réunit dans le salon ; grâce au comte, il régnait une espèce de gaîté. D’ailleurs, Mlles Maigrelut avaient fini par le trouver aimable, pour des pastilles qu’il leur avait quelquefois apportées.

On habilla la mariée en blanc, avec une couronne et un bouquet de fleurs d’oranger, comme c’est l’usage. Elle s’impatienta beaucoup, parce que tous ces dérangements inaccoutumés l’empêchèrent de se mettre à la fenêtre. Quand il fallut sortir, elle éprouva un grand déplaisir, et lorsque M. Cabarot s’avança au-devant d’elle, en grand costume, et lui prit la main, qu’elle vit des visages inconnus et une sorte de solennité répandue partout, elle parut