Page:Gobineau - Mademoiselle Irnois - 1920.djvu/45

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

— “Mille noms d’un diable ! regardez quel pavé me tombe sur la tête !”

Six yeux s’illuminèrent de curiosité, six bras s’étendirent, six mains, armées en tout de trente doigts crochus, voulurent se saisir de l’épître qui bouleversait à tel point le maître du logis.

Mlle Julie Maigrelut fut la plus agile ; elle s’empara de la lettre et la lut rapidement tout haut, puis elle se laissa tomber dans son fauteuil, en s’écriant :

— “Ah mon Dieu !”

Mlle Catherine Maigrelut saisit au vol le précieux papier tombé des doigts de sa sœur et s’écria de même après l’avoir lu tout haut :

— “Ah mon Dieu !”

Mme Irnois, ne pouvant croire ce qu’elle avait entendu deux fois déjà, récita ainsi que ses deux sœurs le contenu de la lettre, et donna comme elles des témoignages évidents de sa désolation profonde.

Les trois femmes pensèrent un instant qu’il ne s’agissait de rien de moins que de faire un très mauvais parti à M. Irnois.

L’ancien fournisseur fut cependant plus brave que ses compagnes et les assura que suivant toutes probabilités les choses n’en viendraient pas là. D’ailleurs ce serait par trop inique. Jamais il n’avait mal parlé d’aucun gouvernement, et de celui de l’Empereur moins que de tout autre ; ses contributions avaient toujours été régulièrement payées. Sans doute il y avait eu jadis quelque peu à redire dans la manière dont il avait chaussé les régiments. Mais toutes