Aller au contenu

Page:Gobineau - Mademoiselle Irnois - 1920.djvu/56

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

— “Je veux bien m’en aller avec lui, reprit Emmelina… Quand est-ce que je partirai ?”

— “Ah ! mon Dieu ! dit Mme Irnois, élevez donc les enfants pour qu’ils soient aussi ingrats ! Cette petite, qui est adorée ici, et qui ne songe qu’à suivre le premier malotru !… Emmelina, vous nous faites beaucoup de peine !”

Emmelina resta fort insensible à cette plainte ; elle souriait, elle riait, elle frappait ses mains l’une contre l’autre ; elle était en proie à une agitation nerveuse telle que jamais on ne lui en avait vu une pareille. Tout le monde autour d’elle était confondu.

M. Irnois ne savait que penser, et était tout prêt à lancer des volcans de jurons. Sans y avoir beaucoup songé, il se croyait sûr de l’éternel attachement de sa fille ; il avait construit sur la mauvaise santé de cet enfant tout un édifice d’espérances que le moment présent faisait crouler. La garder constamment auprès de lui avait été le bonheur sur lequel il avait le plus fermement compté. L’heure présente était bien cruelle.

Il se promenait de long en large dans l’appartement, mais il ne disait rien, il était trop affecté pour pouvoir parler.

Les deux tantes et la mère pleuraient à chaudes larmes. La jeune fille n’y faisait pas la moindre attention.

Ce fut ainsi que la soirée finit dans une consternation profonde d’un côté, de l’autre dans une joie qui ne cherchait pas à se contenir. Jamais on n’avait entendu chanter Emmelina. Quand Jeanne vint la prendre dans ses bras