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EN-NOWEIRI.

pes et de l’argent, avec ordre de rentrer en Ifrîkïa. A son approche, la Kahena dit à son peuple : « Les Arabes veulent s’emparer des villes, de l’or et de l’argent, tandis que nous, nous ne désirons posséder que des champs pour la culture et le pâturage. Je pense donc qu’il n’y a qu’un plan à suivre : c’est de ruiner le pays afin de les décourager. » Elle envoya donc ses partisans partout, afin de renverser les villes, démolir les châteaux, couper les arbres et enlever les biens des habitants. Abd-er-Rahman-Ibn-Zîad-Ibn-Anam rapporte que tout le pays, depuis Tripoli jusqu’à Tanger n’était qu’un seul bocage et une succession continuelle de villages, et que tout fut détruit par cette femme. Quand Hassan s’approcha de l’Ifrîkïa, il eut le plaisir de voir les Roum venir à sa rencontre et implorer son secours contre la Kahena. Il se dirigea alors sur Cabes, dont les habitants vinrent au-devant de lui pour lui offrir une somme d’argent et faire leur soumission. Autrefois ils n’avaient jamais voulu admettre d’émir arabe dans leur ville : aussi, Hassan leur donna pour gouverneur un jeune esclave[1]. De là il se rendit à Cafsa qui se soumit à son autorité, ainsi que Castîlïa et Nefzaoua.

Quand la Kahena vit approcher l’avant-garde arabe, elle fit venir ses deux fils, ainsi que Khaled-Ibn-Yezîd, et leur annonça qu’elle-même serait tuée, et que pour eux, ils devraient se rendre auprès de Hassan et solliciter leur grâce. Le général musulman accueillit les deux transfuges et les mit sous la sauve-garde d’un de ses officiers, puis, il ordonna à Khaled de se porter en avant au galop. Les troupes arabes engagèrent avec celles de la Kahena un combat acharné, et le carnage fut si grand que tous s’attendaient à être exterminés ; mais Dieu étant venu au secours des Musulmans, les Berbères furent mis en déroute, après avoir éprouvé des pertes énormes. La Kahena fut atteinte et tuée pendant qu’elle s’enfuyait. Les Berbères demandèrent grâce à Hassan, et obtinrent leur pardon, à la condition de fournir aux Musulmans un corps auxiliaire de douze mille hommes. Cette troupe fut aussitôt mise, par Hassan, sous les ordres des deux fils de la

  1. Ou page. Le mot arabe rolam signifie garçon, domestique, jeune esclave blanc.