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Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1903, Tome 2.djvu/447

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HENRY


un ami inconnu, au n° 43, de la rue du Rocher, y resta une heure, revint chez sa maîtresse et retourna rue du Rocher pour y chercher quelque réponse. Il repartit, on le perdit de nouveau. À 7 heures, il rentra chez lui où, dans la journée, un étranger, d’un blond roux, de taille moyenne, décoré, avait porté une lettre. Il redescendit le soir, retourna encore une fois chez sa maîtresse et rentra, vers une heure du matin, à son domicile.

C’est dans cette maison de la rue du Rocher (mais chez qui ? par quel intermédiaire ?) qu’Esterhazy communique avec Henry. Et il fit marcher ses journalistes, Millevoye (dans la Patrie), Drumont, qui publia l’un de ses plus violents articles contre « le Syndicat Dreyfus[1] ». L’historien Monod, en lisant ces articles, eut l’impression qu’ils étaient inspirés par le véritable traître : ce langage furieux n’est celui ni d’un patriote exalté ni même d’un charlatan du patriotisme ; c’est un coupable qui tremble d’être découvert : le coupable est à Paris[2].

Gonse et Boisdeffre, à plusieurs reprises, avaient demandé à Picquart si le ministre ne lui avait rien dit de particulier au sujet de l’affaire Dreyfus[3]. Et, comme le colonel répondait négativement, ils s’en étonnaient. Pourquoi ces nouvelles hésitations de Billot ? Enfin, le 12 novembre, il se décida ; il dit à Picquart qu’il avait en mains une pièce qui prouvait formellement la culpabilité de Dreyfus et il lui en énonça le contenu, mais sans la lui montrer[4]. Picquart « s’inclina

  1. Libre Parole du 17 novembre 1896.
  2. Cass., I, 457, Monod.
  3. Ibid., 172 ; Rennes, I, 450, Picquart.
  4. Cass., I, 172, Picquart ; 264, Boisdeffre. — Rennes, I, 450, Picquart. — À l’enquête Bertulus (13 février 1898), Picquart dépose que Billot lui « dit le texte approximatif de la pièce » ; il le reproduit, de mémoire : « Maintenant que l’on recom-