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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


renvoi, déclara « n’avoir lieu à suivre contre Walsin-Esterhazy et la nommée Pays[1] ».

Un exprès porta aussitôt à la prison de la Santé l’ordre de mettre Esterhazy en liberté. L’écrou levé, il alla chercher sa maîtresse à Saint-Lazare.

Ainsi croula cette tentative où, depuis cinq mois, les défenseurs de Dreyfus avaient mis toutes leurs espérances, à laquelle Zola avait été sacrifié et dont l’échec consacrait la victoire de l’État-Major et de Cavaignac.

XIV

Le juge Fabre, devant qui Picquart et Leblois avaient été renvoyés et qui suivit son instruction parallèlement à celle de Bertulus[2], était intelligent, honnête homme, incapable de s’abaisser dans sa propre estime pour avancer dans sa carrière, fort libre-penseur et radical d’opinions ; mais plus attaché à l’extérieur de la loi qu’à la loi elle-même et avec plus de connaissance des textes que des hommes, il se fourvoya en toute loyauté autant qu’eût pu le faire un magistrat sans conscience[3].

  1. 12 août 1898. — Cet arrêt fut attaqué par Picquart ; il n’aurait pu l’être valablement que par le ministre public. (Arrêt de la Cour de cassation du 2 septembre 1898.) L’action publique contre Esterhazy ou la fille Pays pour faux et usage de faux se trouva ainsi éteinte.
  2. Du 13 juillet au 20 août 1898.
  3. Il n’avait pas encore été mêlé aux incidents de l’affaire Dreyfus, sauf pour instruire, en février 1898, d’une plainte en escroquerie déposée par la veuve du général Chanzy et par Mme Dupuy contre un individu se disant Maurice Lenoir. Les