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LA MORT D’HENRY


Mont-Valérien, 31 août.
Mon Général,

J’ai l’honneur de vous prier de vouloir bien venir me voir ici. J’ai absolument besoin de vous parler.

Veuillez agréer, je vous prie, mon Général, l’expression de mes sentiments respectueux.

J. Henry.

Un peu plus tard, le lieutenant de service entra dans sa chambre, n’observa rien de suspect.

Il y a de la sommation dans ce laconique billet. Bien qu’il eût toujours bousculé Gonse, il était trop soldat pour ne pas se rendre compte, s’il avait encore quelque sens, combien la visite qu’il réclamait de Gonse eût été extraordinaire. Quoi ! le sous-chef de l’État-Major général se serait rendu chez ce faussaire, dans sa prison ! Henry avait joué de la presse comme pas un, connaissait les habitudes des journalistes. De sa fenêtre, il eût pu les voir guettant le Mont-Valérien. La démarche de Gonse aurait été connue aussitôt, trompettée dans le monde entier, comme celle d’un complice apeuré.

Qu’avait-il à dire à Gonse ? Le général avait assisté à l’interrogatoire chez Cavaignac ; puis Henry lui avait

    qu’après lecture du procès-verbal, établi comme officier de police judiciaire par le commandant Walter à la date du 31 août 1898, procès-verbal qui contient le passage ci-après : « Il déjeuna légèrement à 11 heures et fit mettre aussitôt à la poste une lettre dont on n’a pas regardé l’adresse ; je me suis enquis de la personne à laquelle avait pu être adressée la lettre ci-dessus visée. Ayant appris que M. le général Gonse était le destinataire de cette lettre, j’ai prié cet officier de vouloir bien m’en donner connaissance… La copie ci-dessus ayant été prise afin de pouvoir remettre à M. le général Gonse l’original qui ne nous a paru d’aucun intérêt, nous nous sommes dessaisi de la lettre pour être remise à son destinataire. » — La note de Roget est visée par Mornard (Cass., III, 513).