Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1904, Tome 4.djvu/237

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
233
BRISSON


propos, notamment à Drumont[1] ; celles de ces officiers, du commandant de Maudhuy, de Cuignet surtout, « qu’il n’y avait jamais eu qu’un seul faux au dossier de Dreyfus »[2], que tous les autres documents, passés au crible le plus sévère, étaient authentiques, « irréfragables », arrêtèrent l’élan vers la Revision.

La grande majorité, qui s’y résignait ou allait s’y résigner, en avait trop longtemps et trop violemment détesté l’idée pour s’y être attachée si vite. Deux éléments avaient composé l’immense conviction contre Dreyfus : il était juif, et sept officiers l’avaient déclaré coupable ; — maintenant, après le faux, le ministre de la Guerre le disait plus coupable que jamais. Les nationalistes, les cléricaux de toutes sortes, qui, depuis deux jours, se terraient, réapparurent, l’outrage et la menace à la bouche. La masse des officiers, un instant déconcertés, interloqués, reprit de l’assurance. Pellieux, qui le 1er septembre a demandé la Revision, le 2 la repousse en même temps qu’il retire sa démission[3]. Le directeur de L’École des Chartes (Paul Meyer) lui avait envoyé, après les aveux et avant le suicide d’Henry, ses « sincères condoléances », en souvenir de leurs assauts du procès Zola. Pellieux répliqua par ce billet, qu’il fit

  1. Lettre de Lasies, député du Gers, à Drumont, du 2 septembre 1898 : « Le ministre de la Guerre m’a très nettement déclaré… Sa figure reflétait son énergie… Il m’a autorisé à publier et à répandre ces affirmations si catégoriques. » — L’article de Drumont sur Henry est intitulé : « La fin d’un soldat. »
  2. Cavaignac, dans son discours du 7 juillet, avait parlé de deux autres lettres qui encadraient, confirmaient la lettre où Dreyfus était nommé. Par conséquent (ainsi que Jaurès, Monod et moi le fîmes observer), c’étaient aussi des faux. (Siècle du 5 et du 6, Petite République du 8). Journal des Débats : « Le colonel Henry a fait un faux : n’a-t-il fait que celui-là ? ».
  3. Zurlinden lui fit retourner sa lettre par le général Borius. (Note du 2 septembre 1898.)