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BRISSON


de 50.000 francs pour entrer en campagne) lui seront versés par un intermédiaire[1]. Il ne rendra compte de ses opérations, « de l’emploi qu’il fera de l’argent », qu’au prince lui même. Pourtant, Fernand de Ramel, député du Gard et président de la droite royaliste, et le comte Henri de Lur-Saluces auront connaissance du plan arrêté. Guérin « s’assurera » le concours d’un très grand nombre de syndicats et d’associations ouvrières ; dès qu’une occasion favorable se présentera, le mouvement ouvrier, commandé par lui, se fera sur le nom du prétendant ; « si la bienveillance de ces syndicats se manifestait avant l’heure décisive par certaines attitudes, il conviendra d’en paraître aussi surpris que satisfait »[2]. En même temps, Guérin mettra au service du duc les 5.000 hommes de la Ligue antisémitique, liera partie avec les autres associations antisémites et royalistes, surtout avec les sociétés de jeunes gens, et essaiera d’« envahir » la Ligue des patriotes, de l’absorber. « C’est Déroulède, écrit Ramel, qui pourrait le plus[3]. »

Par malheur Déroulède, travaillant pour lui-même, recevait volontiers des subsides, mais ne se vendait pas[4]. Il s’obstina à se dire républicain, repoussa

  1. De Plas, administrateur de la Gazette de France (Haute Cour, I, 6). — Guérin recueillit également d’autres « souscriptions » ; selon Spiard (59), environ 600.000 francs.
  2. Haute Cour, I, 4, Note du duc d’Orléans. — Tout cela est confirmé par Spiard (58, 59, etc.) et G. Méry (Libre Parole des 18 et 19 mai, 7 juin 1902, etc.) : « Guérin, qui avait toujours affiché des opinions républicaines, s’est, pour de l’argent, vendu au duc d’Orléans. »
  3. Notamment avec la Ligue de la Jeunesse antisémite, présidée par Dubuc, et avec les associations de la Jeunesse royaliste de Paris, l’Œillet blanc, l’Alouette gauloise, la Gamelle. (Rapport Hennion, 4.) — Lettre du 27 septembre 1898.
  4. « Déroulède n’est pas hostile, mais il est déroulédiste. » même lettre.) — Rapport de Michelin à Godefroy (Scellés Dérou-
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