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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS

C’étaient là, selon Cuignet, qui ne parla même pas de l’écriture du bordereau, « les preuves directes de la culpabilité de Dreyfus ». Pour le terrible dossier qui devait tout emporter, il dit de lui-même qu’il n’en résultait de preuves « que par suite de déductions et de présomptions concomitantes[1] ».

Quand il eût éliminé les pièces de la deuxième section, sans importance et postérieures à la condamnation ; celles de la troisième, qu’il reconnaissait fausses — notamment la lettre de l’un des attachés que Cavaignac avait lue à la tribune, où la lettre D… avait été écrite sur un grattage, ainsi que Cuignet l’avait constaté lui-même, et qui avait été antidatée de trois ans par Henry[2] ; — et la pièce Canaille de D…, qu’il tenait pour inapplicable à Dreyfus, que lui resta-t-il ?

Celles qui « encadraient » la fausse lettre de Panizzardi (comme si la fausseté de la pièce principale ne les rendait pas suspectes), et d’informes rognures, dont quelques-unes, encore, avaient été impudemment falsifiées.

Le memento, qui fait apparaître si nettement Esterhazy, il le traduit ainsi : Les documents envoyés à Berlin « ne portent aucun signe qu’ils viennent de l’État-Major » ; d’autre part, Schwarzkoppen « n’attache d’importance qu’aux pièces « qui en viennent » ; « il faut donc que l’officier, dans l’esprit de l’agent, appartienne au ministère de la Guerre[3].

Tous ses raisonnements sont de cette force, et de ce que plusieurs s’appuyent sur d’autres faux d’Henry,

  1. Cass., I, 356, Cuignet.
  2. Bertillon expertisa que la lettre D… avait été récrite sur un D… (Cass., I, 500), alors, comme on l’a vu (24) que c’était sur un P.
  3. Cass., I, 359, Cuignet. Voir t. I, 34.