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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


pouvait le nommer même au ministre ; il en avait engagé sa parole, « cette parole d’honneur d’un officier qui ne s’interprète pas ». Et Cavaignac eût beau s’irriter, « parce qu’il devait tout savoir afin de briser le Syndicat », Du Paty accepta seulement d’engager cet officier (apparemment Pauffin) à se dénoncer lui-même. Puis, s’étant aperçu « qu’il était étroitement filé », il n’alla pas le voir, parce que « le voir, c’eût été le livrer[1] ».

Cavaignac appela alors Gribelin qui rejeta tout sur Du Paty[2], puis Gonse, qui chercha surtout à se dégager de cette mauvaise affaire. Il protesta vivement, tant en son nom qu’au nom de Boisdeffre, toujours malade et qui n’avait pas repris ses fonctions, que l’entrevue de Montsouris avait eu lieu à leur insu ; il avait tout juste appris cette équipée, par hasard, de Gribelin, au moment où celui-ci avait été mandé chez le ministre ; l’archiviste croyait Gonse au courant ; Henry l’avait détrompé ; Gonse avait alors « pressé de questions » Henry, « qui était fort embarrassé » et qu’il avait vainement tancé ; il venait seulement d’informer Boisdeffre[3]. « La conduite de

  1. Instr. Tavernier, 13 juillet 1899, Du Paty. — Le 21 : « J’ai cessé de croire que l’officier en question eût été mêlé à l’incident. »
  2. Rennes, II, 157, Gonse. Il couvre Gribelin qui a obéi à Henry, « qui est allé à Montsouris comme il serait allé à Bruxelles ou au feu » ; « il est persuadé que Du Paty s’est entendu avec Henry. » (II, 165, 198.)
  3. Cass., I, 558, Boisdeffre ; I, 566 ; II, 198 ; Rennes, II, 157 et 160, Gonse : « Ces Messieurs (Henry et Gribelin) m’expliquèrent ce qui s’était passé ; je leur dis que c’était bien extraordinaire que ce soit au mois de juillet que j’apprenne ce qui n’était passé au mois d’octobre ; j’en fis l’observation très nette et très vive au colonel Henry. — Esterhazy raconta qu’il avait parlé lui-même à Gonse de l’entrevue de Montsouris : « Veut-il que je lui décrive son salon ? Son costume de chambre ? » (Matin du 23 avril 1899).