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CHAMBRES RÉUNIES


qué Cavaignac, c’est-à-dire les aveux, ne résiste pas à l’examen ; en effet, cette phrase : « Si j’ai livré des documents… », Cavaignac l’a isolée de l’ensemble des propos que Lebrun-Renaud attribue à Dreyfus ; tout ce qui est relatif à Mercier et à Du Paty en a disparu ; et, dès lors, « les prétendus aveux ne sont pas, pour l’admission de la demande en revision, un obstacle ». — La discussion technique du bordereau, c’est-à-dire de notes qu’on n’a pas, ne permet que des hypothèses ; le dossier secret ne prête, de même, qu’à des inductions ; une seule certitude s’en dégage, attestée par Cuignet, c’est que les attachés militaires étrangers « avaient d’autres agents pour les renseigner, pendant que Dreyfus était au ministère de la Guerre », et qu’après son arrestation, « ils ont continué à se livrer à des menées d’espionnage et à avoir à leur disposition des indicateurs ». — Que reste-t-il donc, « au point de vue strictement juridique » ? Rien que l’écriture du bordereau et le papier-pelure quadrillé.

Il s’arrêta un instant, posa la question, la simple et pauvre question, la seule qu’avait voulu connaître Scheurer et que, dans le déluge des inventions et des révélations, des hypothèses et des faits connexes, dans la fumée et la poussière de la bataille, sous le monceau des écrits et des discours, les combattants avaient presque oubliée :

Le bordereau, base principale et de l’accusation et de la condamnation, est-il, oui ou non, de la main de Dreyfus ?

Tout était là.

Il s’arrêta de nouveau. Tous les yeux étaient fixés sur lui. Nulle minute plus solennelle. Il semblait que le