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Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1905, Tome 5.djvu/149

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DÉFENSE RÉPUBLICAINE


hostile à Dreyfus, était porté à le croire innocent et ne s’en cachait pas ; Pressensé, à qui il arrivait d’avoir le renseignement, inexact et la plume fâcheuse, le prit lourdement à parti, le traita de « bourreau », décidé d’avance à condamner[1] ; Saxcé, d’autant plus offensé qu’il était plus sûr de sa loyauté, riposta par des injures : « Les règlements militaires ne me permettent pas de répondre à votre violent article, mais il n’est au pouvoir de personne de m’empêcher de vous dire que vous êtes un immonde polisson[2]. » — À Paris, à l’École militaire, harangue du lieutenant-colonel de Coubertin à ses cuirassiers : « Je regrette de ne vous avoir pas fait mettre sabre au clair contre les gens qui criaient « Vive Picquart ! » sur le parcours du régiment… Le cas échéant, je vous engage à vous servir de vos armes contre les insulteurs de l’armée[3]. » — Nécessairement, les nationalistes exultèrent : « Enfin, les chefs redressent la tête ; ils regardent en face les sans-patrie ; ils auront des imitateurs ; il faut qu’ils continuent : ils continueront ; la charte de l’armée a été violée par les ministres qui, depuis deux ans, désertent successivement leurs postes ; l’armée exaspérée n’a plus qu’une ressource, celle de se défendre elle-même[4]. » — Et Krantz fit celui qui n’avait rien entendu, pour cette

  1. Aurore du 7 juin 1899. — La dénonciation contre Saxcé vint (peut-être) d’un adversaire de la revision, spéculant sur l’intempérance de Pressensé et de Vaughan. Dès que Demange connut le malencontreux article, il avertit Mathieu Dreyfus de la grossière erreur. C’était trop tard.
  2. 9 juin.
  3. 12 juin. — Cette harangue, reproduite par divers journaux, fut confirmée, dans le Gaulois du 26, par le frère du colonel de Coubertin.
  4. Judet, dans le Petit Journal du 17. (De même Drumont, Coppée, Rochefort, etc.)