Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1905, Tome 5.djvu/301

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RENNES


— Je ne lui ai pas écrit. — N’avez-vous pas posé des questions indiscrètes au capitaine Boullenger ? — Je me souviens de lui avoir dit : « Qu’est-ce qu’il y a de neuf au quatrième bureau ? » — N’êtes-vous pas allé à Bruxelles, en 1894 ? — Non, en 1885 ou 1886. — Comment fréquentiez-vous une Autrichienne suspecte d’être une espionne ? — Le commandant Gendron (l’ancien adjoint de Sandherr, qui allait également chez Mme Déry) a déposé, au procès de 1894, qu’il n’avait jamais vu son nom sur les listes d’espionnage. — Ne vous êtes-vous jamais livré à des dépenses qu’il s’agissait de masquer par la bonne tenue des comptes de votre intérieur ? — Jamais. — N’avez-vous pas dit au capitaine Duchatelet que vous aviez perdu chez une femme galante la forte somme ? — J’affirme que je n’ai jamais joué. — N’avez-vous pas joué aux courses ? — Jamais. » Ou encore : « Pourquoi votre présence en Alsace a-t-elle été tolérée ? — Pendant sept ans, les passeports m’ont été refusés. — Et cependant vous y êtes allé ? — Trois fois, en me cachant, en passant par la Suisse. — Et une fois là-bas ? — Je ne suis pas sorti de chez moi. — N’avez-vous pas suivi les manœuvres allemandes à Mulhouse ? — Jamais. — Vous n’avez pas tenu conversation avec un officier de dragons ? — Jamais je n’ai causé avec un officier allemand. » Voilà tout (exactement) ce que Jouaust avait retenu comme de moins extravagant et écrit sur de longues feuilles qu’il tenait à la main, et s’il n’avait pas demandé : « N’avez-vous pas écrit au commandant Esterhazy ? », on eût pu croire qu’il n’en avait jamais entendu parler.

Dreyfus lui fit toutes ses réponses d’une voix claire, assurée ([1], nullement cette voix « blanche », aigre,

  1. Claretie : « La voix qu’on me disait aigre est très mâle et assurée. » De même Jaurès. Pour Barrès, la voix est « sans