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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


police que Viguié et Hennion lancèrent à la poursuite de l’assassin, dès qu’ils furent instruits de l’attentat. « L’agent, sans s’arrêter, cria au domestique d’aller chercher des armes » ; le gendarme lui fit faire demi-tour pour reprendre ensemble la poursuite[1]. Mais l’inconnu, entre temps, avait disparu, servi à la fois par le répit que lui avait laissé la prudence du domestique et par l’orage qui éclata à ce moment, une pluie abondante d’été, secouée par de violentes rafales, et « qui fit plus déserte encore cette banlieue[2] ». Personne ne savait plus où il était passé.

Il n’y avait pas une demi-heure qu’il avait fait son coup, mais il n’avait pas perdu une seconde ni commis une faute.

Pendant que l’homme s’échappait ainsi, s’évanouissait comme dans une trappe, Mme Labori était accourue auprès de son mari, que des passants relevaient et qui n’avait point perdu connaissance. On raconta un peu plus tard, dans la fièvre de cette tragique journée, qu’il avait imploré le secours de dix ou douze personnes, que telle était la férocité, la terreur propagée par les prêtres, que ces appels n’avaient pas été entendus ; enfin qu’un jeune homme, se disant interne en médecine, sous prétexte d’examiner la plaie, lui avait volé son portefeuille qui contenait des pièces importantes[3].

  1. Instr. Guesdon, Bouvier.
  2. Barrès, 171.
  3. Aurore du 15. Un Crime nationaliste, récit d’un témoin : « On s’étonne (Labori une fois ramené chez lui) de ne point trouver son portefeuille dans sa poche. Labori tout à coup s’écrie : « On me l’a volé ! » (Suit l’anecdote du faux interne.) Cette abominable histoire m’est contée dans l’antichambre par Me Hild, le secrétaire dévoué de Labori, qui ajoute : « On a voulu lui prendre aussi sa serviette. Il s’en est aperçu