Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1905, Tome 5.djvu/394

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
384
HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


ne l’a même pas écrit, la fameuse lettre étant de l’écriture truquée de Dreyfus. — Aussi bien Esterhazy et Dreyfus font sans doute partie de la même bande, vu que Picquart lui-même a dit à la Cour de cassation, à propos de la note sur Madagascar : « Il serait intéressant de savoir si Émile Weyl (qui avait publié dans le journal le Yacht des renseignements assez exacts sur la future expédition) a pu avoir des accointances soit avec Dreyfus, soit avec Esterhazy[1] » ; sur quoi Roget faisait un seul personnage de l’ancien officier de marine, et de Maurice Weil, l’ancien camarade d’Esterhazy et d’Henry[2]. — D’autre part, il ne sait rien de la visite d’Esterhazy à Schwarzkoppen, le même jour que l’entrevue de Montsouris[3], et, comme Mercier, par défiance de ce bavard, ne l’a pas mis dans le secret du faux impérial, il repousse l’hypothèse du bordereau décalqué par Esterhazy, puis renvoyé à son destinataire. « Cela ne tient pas debout », dit-il, mais pour deux raisons qui n’étaient pas moins absurdes : « Attendu qu’on ne connaissait pas le con-

  1. Cass., I, 182, Picquart. — Émile Weyl, dès qu’il connut la déposition de Picquart, protesta qu’il n’avait jamais eu de rapports avec Esterhazy et n’avait jamais parlé avec Dreyfus de Madagascar ; son article du Yacht reproduisait des informations courantes à l’époque et avait fait, à sa demande, l’objet d’une enquête par le ministère de la Marine en 1896. (Lettre à Mazeau du 19 avril 1899.) — Weyl mourut peu après le procès de Rennes (25 décembre 1899).
  2. Rennes, I, 292, Roget.
  3. Ibid., 325, Roget. — Demange lui dit que la visite d’Esterhazy à Schwarzkoppen a été confirmée par Du Paty à l’enquête du général Renouard ; Roget répond : « Je trouve la démarche singulière et je ne sais pas à quel mobile obéissait Esterhazy. » — Sur l’entrevue de Montsouris, en réponse à cette question de Demange : « Comment un homme innocent comme Esterhazy avait-il besoin que l’on vînt à son secours ? — Il est certain que moi je ne l’aurais pas fait. Maintenant, je ne vois pas que Du Paty soit absolument répréhensible. »