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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


Demange et le mien. Mais d’autres se prononçaient pour le renvoi devant le conseil de guerre : Ballot-Beaupré et Manau, « parce que le mot parties ne peut s’entendre ni du « vrai coupable possible », quand il a été acquitté, ni du « faux témoin possible », quand il est « mort sans avoir été jugé » ; ou, encore, parce qu’Esterhazy « n’a pas été condamné par contumace[1] » ; Clemenceau, avec Labori, parce que la victoire devant un conseil de guerre leur semblait plus éclatante ; et Lucie Dreyfus, parce que c’eût été le sentiment de son mari. Elle rappelait qu’il aurait pu contester, en 1894, la fausse qualification de haute trahison donnée au délit d’espionnage dont il était accusé, et qu’il avait formellement enjoint à Demange de n’en pas discuter. Mornard s’inclina, non sans regret, indiqua seulement son système : « L’honneur de Dreyfus,

    fait, il n’y avait plus possibilité d’engager des débats contre toutes les parties. Thézard ajoute, ce qui n’est pas contesté, que « le mot notamment de l’article 445 n’a nullement le caractère limitatif ». — Bard, dans son rapport d’octobre, avait déjà indiqué que « l’accusation (contre Dreyfus) restait, à son avis, absolument désarmée, à tel point qu’on serait amené à se demander s’il ne vaudrait pas mieux casser sans renvoi ». (Revision, 124.)

  1. Cass., III, 36 et 37, Ballot-Beaupré. Il répond directement à l’article de Thézard : « Dans l’article 445 » le mot « parties », rapproché du mot « condamnés » qui vient ensuite, ne s’applique qu’aux personnes dont la condamnation est à reviser ; car ce sont les seules pour lesquelles on ait à se demander quel sera le juge de la revision, si ce sera un tribunal de renvoi, ou si ce sera la Cour de cassation elle-même. » — En sens contraire, Garraud, Droit criminel, 937 ; J.-A. Roux, dans le recueil de Sirey (99, I, 473-474) ; Appleton : « Le bon sens paraît bien commander cette solution. Comment imaginer que la loi ait prévu l’impossibilité de débats oraux contre toutes les parties, si elle n’avait voulu désigner par là que le seul condamné ? » Il faut observer, en outre, que l’article 445 vise surtout le cas de revision fondé sur deux arrêts (deux condamnations) inconciliables. De là, lors de l’élaboration de la loi de 1895, la substitution des mots contre toutes les parties à l’ancien texte entre les parties. (Dalloz, année 1867, IV, 64 : année 1895,