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sienne. L’un des biographes anglais de George Sand[1] cite, avec beaucoup de justesse, cette circonstance comme servant à justifier beaucoup de faits de sa vie, ainsi que son opinion sur ce qu’on appelle le libre amour et la « facilité » avec laquelle elle l’envisageait. Ce n’est pas seulement le tempérament sensuel et passionné de la famille qui se manifestait chez elle, mais aussi les exemples dont elle avait été témoin dans son enfance, cette atmosphère de relâchement moral qu’elle respirait et dans laquelle elle grandissait, ce ménage où le père et la mère avaient des enfants « de provenance inconnue », ce qui n’était ignoré de personne, et où cet ordre de choses, plus qu’étrange, était considéré comme simple et naturel. Ces impressions et les déductions inconscientes qui en résultaient s’incrustèrent pour toujours dans l’âme de George Sand. Jusque dans sa vieillesse, mère et grand’mère idéale, d’une exigence morale sévère pour elle-même et les autres, elle ne put jamais se défaire d’une certaine indulgence lorsqu’il s’agissait de ce qui s’appelle l’amour physique. Elle se montra toujours indulgente dans ses jugements sur les liaisons des jeunes amis et des parents qui l’entouraient. Le respect que nous devons à des personnes qui sont encore en vie ne nous permet pas d’initier le lecteur à des faits, à des récits que nous connaissons, mais nous ne pouvons passer sous silence l’étrange impression qu’ils ont produite sur nous. Ceux qui nous les ont racontés ne nourrissaient aucune malveillance envers George Sand ; ils n’avaient d’autre but que de prouver la largeur de ses opinions et son indulgence envers la pauvre humanité pécheresse. Ce trait de George Sand, nous l’attribuons bien plus aux habitudes de pensée

  1. Blackwood’s Edinburgh. Magazine, vol. CXXI (January-June 1877).