Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T1.djvu/292

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rapporte à 1825, et au voyage de Lourdes qui vient de nous occuper.

Retournons maintenant à la journée qu’elle décrit à sa mère dans la lettre dont il a été question plus haut… « Nos compagnons arrivèrent et nous nous enfonçâmes encore dans les détours d’un labyrinthe étroit et humide, nous aperçûmes au-dessus de nos têtes une salle magnifique, où notre guide ne se souciait guère de nous conduire. Nous le forçâmes de nous mener à ce second étage. Ces messieurs se déchaussèrent et grimpèrent assez adroitement ; pour moi j’entrepris l’escalade.

« Je passai sans frayeur sur le taillant d’un marbre glissant, au-dessous duquel était une profonde excavation. Mais quand il fallut enjamber sur un trou que l’obscurité rendait très effrayant, n’ayant aucun appui pour mes pieds, ni pour mes mains, glissant de tous côtés, je sentis mon courage chanceler. Je riais, mais j’avoue que j’avais peur. Mon mari m’attacha deux ou trois foulards autour du corps et me soutint ainsi pendant que les autres me tiraient par les mains. Je ne sais ce que devinrent mes jambes pendant ce temps-là ! Quand je fus en haut, je m’assurai que mes mains (dont je souffre encore) n’étaient pas restées dans les leurs et je fus payée de mes efforts par l’admiration que j’éprouvai.

« Nous rentrâmes à Lourdes dans un état de saleté impossible à décrire ; je remontai à cheval avec mon mari, et, nos jeunes gens prenant la route de Bordeaux, nous prîmes tous deux celle de Bagnères. Nous eûmes, pendant dix lieues, une pluie à verse et nous sommes rentrés ici à dix heures du soir, trempés jusqu’aux os et mourant de faim. Nous ne nous en portons que mieux aujourd’hui »…

Le ton de cette lettre à sa mère est assez calme, et presque