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tures, Aurore apprenait peu à peu à connaître leur développement, la position et les conditions de chaque famille, de chaque habitant de Nohant en particulier ; elle se mettait par là en rapports directs avec chacun et avec tous. Ses relations personnelles avec les paysans s’établirent dès lors pour toute sa vie et la mirent à même, lorsqu’elle devint plus tard seule maîtresse à Nohant, de les aider d’une manière rationnelle et sérieuse, et non de loin, par les dons qu’elle aurait pu leur envoyer. Ce secours raisonnable porté aux paysans durant toute la vie de Mme Sand fit, qu’au jour de ses funérailles, le villageois qui vint déposer au nom de tout son village, une couronne sur sa tombe, put dire qu’ « à Nohant, il y avait des paysans, mais pas de pauvres ». Quelque insignifiante qu’ait pu paraître cette aide accordée à quelques dizaines de familles, elle n’en a pas été pour cela moins réelle, et plût à Dieu que chacun fit ce que Mme Dudevant avait fait dans sa petite commune de Nohant.

C’est ainsi, qu’à partir de 1826, Aurore s’occupa tout particulièrement du traitement des malades. La grande difficulté qui se présentait à elle était le manque d’argent ou le peu qu’elle en possédait. L’enquête judiciaire prouva qu’elle n’avait même jamais touché les 1 500 francs qu’elle avait voulu recevoir au lieu des 3 000 francs qui lui étaient assignés par son contrat de mariage. Elle ne s’en était jamais plainte, n’avait rien réclamé de son mari, — quoique toute la fortune fût sienne, — n’avait jamais dépensé un sou sans en demander auparavant l’autorisation à son mari. Lorsqu’en 1831, après neuf ans de mariage, elle pria son mari de payer les dettes personnelles qu’elle avait faites, ces dettes ne s’élevaient qu’à 500 francs[1]. Faute d’argent qui

  1. Histoire de ma vie, t. IV, p. 63.