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Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T1.djvu/405

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peu au courant des œuvres de G. Sand et de ce qu’on a écrit sur elle, sait parfaitement bien, tandis que cela ne peut rien expliquer à celui qui ignore œuvres et critiques.

Portons maintenant notre attention sur ce fait, qu’en dépit des attaques répandues, dès l’apparition d’Indiana et de Valentine, sur ces romans, leur tendance, le désir de l’auteur de « saper la sainte institution du mariage », le lecteur impartial d’aujourd’hui en jugera tout autrement et n’y trouvera aucune apologie d’immortalité. Tout au contraire, dans les deux romans, les héroïnes sont punies pour avoir violé leurs devoirs d’épouses. Indiana, qui fuit le toit conjugal, expie sa faute, en découvrant la perfidie et la bassesse de l’homme aimé ; Valentine et Bénédict périssent l’un après l’autre, ayant à peine goûté au fruit défendu. Ici comme là, le châtiment ne surgit pas comme un deus ex machina, mais ressort logiquement de l’engrenage de relations et de circonstances où les héroïnes ont été entraînées par leurs amours fatales[1]. C’est la même thèse que celle du roman génial de Tolstoï avec son adage implacable : « À Moi la vengeance et c’est Moi qui châtie. » (Anna Karénine).

Quoi qu’il en soit, dans les deux premiers grands romans que George Sand a écrits sans collaborateur, son talent d’écrivain apparaît déjà déterminé et éclatant, et même on

  1. M. Skabitchevsky, qui dans ses études sur G. Sand fait une analyse à tendance, et très étroite, de ses romans, tombe souvent dans des erreurs fort curieuses (surtout à propos de Lélia, de Jacques et de Spiridion). En expliquant d’une manière absolument étrange le dénouement de Valentine, il dit que « la malédiction de Louise, à la fin de l’ouvrage, jette une lumière toute spéciale sur toute la marche du roman » et que « la lutte ascétique de Valentine est comme un reste de morgue nobiliaire, qui l’empêche de sacrifier au bonheur de son amant les préjugés traditions de son monde »… Selon lui, la fin