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changeait et biffait dix fois la même chose avant de se montrer content. L’Histoire de ma Vie, la Correspondance et la Notice[1] consacrée à la mémoire de de Latouche, nous font juger par quelle rude école ce dernier avait fait passer George Sand. Elle en parle pourtant avec reconnaissance mais avec un peu de raillerie déguisée. Il désirait toutefois que chaque nouveau talent fût original et ne pouvait souffrir l’imitation. Lorsque George Sand eut écrit Indiana, de Latouche, mécontent de l’amitié naissante d’Aurore pour Balzac, prit le premier exemplaire du livre, celui qu’elle venait de lui donner, se mit à le feuilleter avec méfiance, craignant d’y trouver quelque chose d’inférieur, à l’imitation de Balzac (« Pastiche, que me veux-tu ? Balzac, que me veux-tu ? »). Mais après avoir parcouru quelques chapitres et s’être convaincu du talent personnel de l’auteur, il lui fit amende honorable et la pria d’oublier ses duretés. Voilà comment il appréciait le mérite vrai et se réjouissait du succès de sa jeune amie.

Cette amitié fut de courte durée. Vers 1832, George Sand fit la connaissance du critique Gustave Planche. On a assuré que Planche a vécu, lui aussi, dans une intimité trop grande avec elle. Depuis la publication dans la Revue de Paris des lettres de George Sand adressées à Sainte-Beuve en juillet et août 1833, on sait que c’est là une profonde erreur. Dans la première de ces lettres, George Sand dit entre autres : « On le regarde comme mon amant, on se trompe. Il ne l’est pas, ne l’a pas été et ne le sera pas » ; dans la seconde : « Planche a passé pour être mon amant ; peu m’importe. Il ne l’est

  1. Imprimée dans le Siècle des 18, 19 et 20 jillet 1851. Reproduite dans les Œuvres complètes de George Sand, dans le volume « Autour de la table ».