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Tout amour a nécessairement un élément sensuel, c’est-à-dire le désir de posséder l’objet aimé et d’obéir, en s’unissant avec lui, aux lois de la nature.

Mais celui qui n’aime que le corps de la personne d’un autre sexe, qui ne tend qu’à satisfaire ses sens, sans posséder l’âme, sans avoir la jouissance spirituelle et partagée, n’aime pas d’un véritable amour, pas plus que le platonique qui n’aime que l’âme et qui dédaigne les jouissances charnelles, ce qui se rencontre dans certains cas d’inversion sexuelle.

Pour l’un, c’est le corps ; pour l’autre, c’est l’âme qui constituent le fétiche : l’amour de tous les deux n’est que du fétichisme.

De pareils individus forment en tous cas un degré de transition vers le fétichisme pathologique.

Cette remarque est d’autant plus juste qu’un autre critérium du véritable amour est celui-ci : l’acte sexuel doit absolument procurer une satisfaction morale[1].

Parmi les phénomènes physiologiques du fétichisme il me reste encore à parler de ce fait très intéressant que, parmi le grand nombre d’objets susceptibles de devenir fétiches, il y en a quelques-uns qui sont particulièrement choisis par un grand nombre de personnes.

Les objets particulièrement attractifs pour l’homme sont : les cheveux, la main, le pied de la femme, l’expression du regard.

Quelques-uns d’entre eux ont, dans la pathologie du fétichisme, une importance particulière. Tous ces faits remplissent évidemment dans l’âme de la femme un rôle dont quelquefois elle ne se doute pas ; d’autres fois c’est préméditation de sa part.

  1. Le spinal cérébral postérieur de Magnan, qui trouve son plaisir avec n’importe quelle femme et auquel n’importe quelle femme plaît, ne peut que satisfaire sa volupté. L’amour acheté ou forcé n’est pas un véritable amour (Mantegazza). Celui qui a inventé le proverbe : Sublata lucerna, nullum discrimen inter feminas [NdT : Flattées par la lumière de la lampe, toutes les femmes se ressemblent] a dû être un horrible cynique. Le pouvoir pour l’homme de faire l’acte d’amour n’est pas une garantie que l’acte procure réellement la plus grande jouissance amoureuse.