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aussi à me faire des amis parmi les petits garçons que je choyais, que je comblais de sucreries et que j’aurais volontiers embrassés. Bien que mon amour en restât toujours aux termes platoniques, il était pourtant d’un caractère anormal. Un propos que j’ai tenu alors inconsciemment sur un camarade adoré et plus âgé que moi, en fournit la preuve : « Je l’aime tant, disais-je, que je préférerais à tout le pouvoir de l’épouser. » Maintenant encore où je vis très retiré, je raffole facilement d’un bel homme, à barbe fine et aux traits intelligents. Mais je n’ai jamais trouvé une âme-sœur à laquelle j’aurais pu me découvrir, pour être comme une amie auprès de lui. Jamais je n’ai essayé de réaliser directement mes penchants ou de commettre quelque imprudence à ce sujet. J’ai finalement cessé de fréquenter les musées où sont exposés des corps d’hommes nus, car les érections que me produisait cette vue, étaient très gênantes. En secret j’ai parfois soupiré après l’occasion de pouvoir dormir à côté d’un homme, et j’en ai trouvé aussi l’occasion. Un monsieur plus âgé, et qui ne m’était guère sympathique, m’y invita un jour.

Cum eo concubui, ille genitalia mea tetigit[ws 1], et bien que sa personne me fût antipathique, j’éprouvai le plus grand bonheur. Je me sentais tout à fait livré à lui ; en un mot je me sentais femme.

S’il m’est permis d’ajouter encore une remarque pour finir, je dois formellement déclarer que, bien que j’aie la pleine conscience de l’anomalie de mes penchants, je ne désire nullement les changer. Je ne fais qu’aspirer après le temps où je pourrai m’y livrer avec plus de commodité et sans risque d’être découvert, afin de me procurer un plaisir qui ne fait de tort à personne.


OBSERVATION 120. – Mlle Z…, trente et un ans, artiste, est venue à la consultation pour des malaises neurasthéniques. Elle attire l’attention par les traits grossiers et virils de sa figure, sa voix creuse, ses cheveux courts, ses vêtements à coupe masculine, sa démarche virile et son aplomb. Pour le reste, elle est tout à fait femme ;  elle a des seins assez développés ; le bassin est féminin ; pas de poils sur la figure.

L’interrogatoire, relativement à l’inversion sexuelle, donne un résultat positif.

La malade raconte qu’étant encore petite, elle aimait mieux jouer avec des garçons, notamment aux jeux « de soldat », « au marchand », « au brigand » etc. Elle dit que dans ces jeux de

  1. Comme nous étions couchés ensemble, il me toucha les parties génitales