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rent[ws 1]. Il ne se souvient pas du tout des faits qui se passent au moment de ces crises, et son excitation extrême peut l’amener jusqu’à la rage. D… avoue qu’il a eu des moments où il n’était plus maître de lui-même ; s’il était resté sans satisfaction, il eût été contraint de s’attaquer à la première femme venue. Cet état d’excitation sexuelle disparaît tout d’un coup après chaque émotion morale violente.


Les deux observations suivantes nous montrent quel état violent, dangereux et pénible constitue l’hyperesthésie sexuelle pour ceux qui sont atteints de cette anomalie.


OBSERVATION 14 (Hyperæsthesia sexualis. Delirium acutum ex abstinentia[ws 2].) – Le 29 mai 1882, F…, vingt-trois ans, cordonnier, célibataire, a été reçu à la clinique. Il est né d’un père coléreux, très violent et d’une mère névropathique, dont le frère était aliéné.

Le sujet n’a jamais été gravement malade ni ne s’est adonné à la boisson, mais, de tout temps, il a eu de grands besoins sexuels. Il y a cinq jours, il a été atteint d’une affection psychique aiguë. Il a fait, en plein jour et devant deux témoins, une tentative de viol, a eu du délire obscène, s’est masturbé avec excès ; il y a trois jours, il a eu un accès de folie furieuse, et, lors de son arrivée à la clinique, il était en état de delirium acutum[ws 3] très grave, avec de la fièvre et des phénomènes d’excitation motrice très violents. Par un traitement à l’ergotine, on amena la guérison.

Le 5 janvier 1888, le même individu fut reçu une seconde fois, présentant des symptômes de folie furieuse. D’abord, il était morose, irascible, disposé à pleurer et atteint d’insomnie. Ensuite, après avoir attaqué sans succès des femmes, il se mit dans une rage de plus en plus violente.

Le 6 janvier, son état s’est aggravé ; il a du delirium acutum très grave (jactation, grincement de dents, grimaces, etc., symptômes d’incitations motrices ; température allant jusqu’à 40°,7). Il se masturbait tout à fait instinctivement. Il a été guéri par un traitement énergique à l’ergotine, qui a duré jusqu’au 11 janvier. Après sa guérison, le malade a donné des explications très intéressantes sur la cause de sa maladie.

De tout temps, il eut de grands besoins sexuels. Son premier coït eut lieu à l’âge de seize ans. La continence lui a causé des maux de tête, une grande irascibilité psychique, de l’abattement, un manque de goût pour le travail, de l’insomnie. Comme il vivait

  1. Aussi, il traitait mal sa propre femme et s’accouplait à elle comme un animal ; il souhaitait que ses propres filles partagent sa couche, car cela lui aurait procuré la plus grande jouissance
  2. Hyperesthésie sexuelle. Délire aigu résultant de l’abstinence
  3. délire aigu