Page:Kropotkine — Paroles d'un Révolté.djvu/166

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Normandie, l’Anjou, des biens qui leur rapportent de dix mille à deux cent mille francs par an, et au-delà.

Ceux-là, certainement, n’ont pas à se plaindre. Après avoir passé quelques mois d’été dans leurs domaines, et après avoir encaissé la valeur de ce qu’ont produit les rudes efforts des travailleurs salariés, des petits fermiers ou des métayers, ils s’en vont dépenser cet argent dans les villes. Là ils boivent le champagne à plein verre avec des femmes auxquelles ils jettent l’argent à pleines mains, et ils dépensent en un jour dans leurs palais de quoi nourrir toute une famille pendant une demi-année. Oh ! ceux-là, en effet, n’ont pas de lamentations à faire ; s’ils se plaignent, c’est de ce que le paysan devient tous les jours moins maniable et refuse aujourd’hui de travailler pour rien.

De ceux-là, ne parlons pas. On leur dira un petit mot le jour de la révolution.




Les usuriers, les marchands de bétail, les « marchands de biens », ces vautours qui s’abattent aujourd’hui sur les villages et qui, arrivés de la ville avec un petit sac pour toute fortune, s’en retournent propriétaires et banquiers ; les notaires et avocats qui fomentent des procès ; les ingénieurs et la bande d’employés de toute sorte qui puisent largement dans les caisses de l’État et dans celles des communes lorsque celles-ci, poussées par des intéressés, s’endettent pour embellir le village autour de la maison de M. le maire, bref toute cette vermine qui considère la campagne comme un riche pays de sauvages bon à exploiter,