Page:Kropotkine — Paroles d'un Révolté.djvu/259

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des élections. Que feront donc ces gouvernants investis de la confiance de tous ?




Jamais élections ne furent plus libres que celles de mars 1871. Les adversaires de la Commune l’ont eux-mêmes reconnu. Jamais la grande masse des électeurs n’était plus imbue du désir d’envoyer au pouvoir les meilleurs hommes, des hommes de l’avenir, des révolutionnaires. Et c’est ce qu’elle fit. Tous les révolutionnaires de renom furent élus par des majorités formidables ; jacobins, blanquistes, internationaux, les trois fractions révolutionnaires se trouvèrent représentées au Conseil de la Commune. L’élection ne pouvait donner un meilleur gouvernement.

On en connaît le résultat. Enfermés à l’Hôtel-de-Ville, avec mission de procéder dans les formes établies par les gouvernements précédents, ces révolutionnaires ardents, ces réformateurs se trouvèrent frappés d’incapacité, de stérilité. Avec toute leur bonne volonté et leur courage, ils n’ont pas même su organiser la défense de Paris. Il est vrai qu’aujourd’hui on s’en prend pour cela aux hommes, aux individus ; mais ce ne sont pas les individus qui furent la cause de cet échec — c’est le système appliqué.

En effet, le suffrage universel, lorsqu’il est libre, peut donner, tout au plus, une assemblée représentant la moyenne des opinions qui circulent en ce moment dans la masse ; et cette moyenne, au début de la révolution, n’a généralement qu’une idée vague, fort vague, de l’œuvre à accomplir, sans se rendre compte de la manière dont il faut s’y prendre. Ah, si le gros