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Page:Kropotkine — Paroles d'un Révolté.djvu/273

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dèrent et la suivirent, la Convention ne fut qu’un boulet aux pieds du peuple.




Les faits que nous enseigne l’histoire sont si concluants sous ce rapport ; l’impossibilité d’un gouvernement révolutionnaire et la nocivité de ce qu’on désigne sous ce nom sont si évidents, qu’il semblerait difficile de s’expliquer l’acharnement qu’une certaine école se nommant socialiste met à maintenir l’idée d’un gouvernement. Mais l’explication est bien simple. C’est que, tout socialistes qu’ils se disent, les adeptes de cette école ont une tout autre conception que la nôtre de la révolution qu’il nous incombe d’accomplir. Pour eux, — comme pour tous les radicaux bourgeois, — la Révolution Sociale, c’est plutôt une affaire de l’avenir à laquelle il n’y a pas à songer aujourd’hui. Ce qu’ils rêvent au fond de leur cœur, sans oser l’avouer, c’est tout autre chose. C’est l’installation d’un gouvernement pareil à celui de la Suisse ou des États-Unis, faisant quelques tentatives d’appropriation à l’État de ce qu’ils appellent ingénieusement « services publics ». C’est quelque chose qui tient de l’idéal de Bismarck et de celui du tailleur qui arrive à la présidence des États-Unis. C’est un compromis, fait d’avance, entre les aspirations socialistes des masses et les appétits des bourgeois. Ils voudraient bien l’expropriation complète, mais ils ne se sentent pas le courage de la tenter, ils la renvoient au siècle prochain et, avant la bataille, ils entrent déjà en négociation avec l’ennemi.

Pour nous, qui comprenons que le moment appro-