Page:Kropotkine — Paroles d'un Révolté.djvu/99

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laire. Ce nombre grandit chaque jour et il ira toujours en grandissant ; mais ce ne sera qu’à la veille même du soulèvement qu’il deviendra majorité, de minorité qu’il est aujourd’hui.




L’histoire est là pour nous dire que ceux qui ont été minorité la veille de la révolution, deviennent force prédominante le jour de la révolution, s’ils représentent la vraie expression des aspirations populaires et si, — autre condition essentielle, — la révolution dure un certain temps, pour permettre à l’idée révolutionnaire de se répandre, de germer et de porter ses fruits. Car, ne l’oublions pas, ce n’est pas par une révolution d’un jour ou deux que nous arriverons à transformer la société dans le sens du communisme anarchiste ; un soulèvement de courte durée peut bien renverser un gouvernement pour en mettre un autre à sa place. Il peut remplacer un Napoléon par un Jules Favre ; mais il ne change rien aux institutions fondamentales de la société. C’est toute une période insurrectionnelle de trois, quatre, cinq ans peut-être, que nous devrons traverser pour accomplir notre révolution dans le régime de la propriété et le mode de groupement de la société. Il a fallu cinq ans d’insurrection en permanence, depuis 1788 jusqu’en 1793, pour abattre en France le régime féodal foncier et l’omnipotence de la royauté : il en faudra bien trois ou quatre pour abattre la féodalité bourgeoise et l’omnipotence de la ploutocratie.

Eh bien, c’est surtout pendant cette période d’excitation, quand l’esprit travaille avec une vitesse accé-