Page:Kropotkine - La Conquête du pain.djvu/270

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Sud. L’exposition de Turin a déjà montré en 1884 les progrès de l’industrie italienne et — ne nous y méprenons pas : — la haine entre les deux bourgeoisies, française et italienne, n’a pas d’autre origine que leur rivalité industrielle. L’Italie s’émancipe de la tutelle française ; elle fait concurrence aux marchands français dans le bassin méditerranéen et en Orient. C’est pour cela, et pas pour autre chose, que le sang coulera un jour sur la frontière italienne, — à moins que la Révolution n’épargne ce sang précieux.

Nous pourrions aussi mentionner les rapides progrès de l’Espagne dans la voie de la grande industrie. Mais prenons plutôt le Brésil. Les économistes ne l’avaient-ils pas condamné à cultiver à jamais le coton, à l’exporter à l’état brut, et à recevoir en retour des cotonnades importées d’Europe ? En effet, il y a vingt ans, le Brésil n’avait que neuf misérables petites manufactures de coton, avec 385 fuseaux. Aujourd’hui il y en a quarante-six ; cinq d’entre elles possèdent 40,000 fuseaux, et elles jettent sur le marché trente millions de mètres de cotonnades chaque année.

Il n’y a pas jusqu’au Mexique qui ne se mette à fabriquer les cotonnades au lieu de les importer d’Europe. Et quant aux États-Unis, ils se sont affranchis de la tutelle européenne. La grande industrie s’y est triomphalement développée.


Mais c’est l’Inde qui devait donner le démenti le plus éclatant aux partisans de la spécialisation des industries nationales.

On connaît cette théorie : — Il faut des colonies aux grandes nations européennes. Ces colonies en-