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dix-huitième runo

Le forgeron fut saisi d’une angoisse poignante, le batteur de fer fut accablé par un moment lourd ; les tenailles lui glissèrent des doigts, le marteau lui tomba des mains.

Et il dit : « Annikki, ma chère sœur, je veux te forger une navette, je veux te forger de gracieux et jolis anneaux, deux ou trois paires de boucles d’oreille, cinq ou six chaînes pour ta ceinture. Mais, de ton côté, prépare-moi un bain doux comme le miel ; fais-moi chauffer une agréable étuve avec beaucoup de petits troncs d’arbres, de petits éclats de bois ; procure-moi aussi un peu d’eau de lessive, un peu de savon moelleux, afin que je puisse me laver la tête, me purifier le corps de la suie qui le couvre depuis l’automne, du mâchefer qui le souille depuis l’hiver. »

Annikki, la vierge célèbre, fit chauffer en secret l’étuve avec des branches détachées par le vent, avec des troncs d’arbre fendus par la foudre ; elle apporta des pierres de la cataracte pour enfanter la vapeur[1] ; elle alla puiser de l’eau à la source des bois d’aulnes, à la source bordée de joncs ; elle coupa des branches d’arbrisseaux dans un bocage, et en composa un doux balai d’amour ; et elle le plaça à l’extrémité d’une pierre riche de miel[2]. Puis, elle fit de l’eau de lessive avec du lait aigre, elle prépara un savon avec de la moelle d’os, un savon facilement écumeux, pour laver la tête du fiancé, pour purifier et blanchir son corps.

Le forgeron Ilmarinen, le batteur de fer éternel, se hâta de forger ce que la jeune fille avait désiré ; il lui forgea une belle parure tandis que l’étuve chauffait, que le bain était préparé. Et il remit la parure entre les mains de la jeune fille.

Annikki dit : « J’ai fait chauffer l’étuve, je t’ai préparé

  1. Les Finnois produisent la vapeur dans leur bain au moyen de gros cailloux brûlants, sur lesquels ils jettent de l’eau.
  2. C’est-à-dire douce et luisante.