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INTRODUCTION

l’imagination différenciée trouble la paix originelle de la pensée. Il n’y a ni unité, ni pluralité des Bouddhas ; il n’y a que l’illumination elle-même occupée à une fonction unique, uniforme et constante.

La seconde partie du M. S. A. est comme une suite de monographies ou Asaṅga reprend les attributs essentiels du Bodhisattva pour les interpréter dans le sens de sa doctrine. La croyance (X) ne fait pas de difficulté : mais l’étude de l’idéal touche (XI) au cœur même du système. Asaṅga définit d’abord l’idéal comme phénomène dans ses trois divisions canoniques (Sûtra, Abhidharma, Vinaya). Mais comment faire pour transporter la vie phénoménale dans l’idéal, pour faire de l’idéal le phénomène de la pensée ? On y arrive par la méthode indiquée déjà au chapitre du Positif (VI) : l’esprit en état d’union garde tout limpide le sens énoncé, et qui est réduit à un simple parler mental ; la réflexion, opérant sur les données de l’audition, identifie le sens (et l’objet correspondant ! au verbe mental lui-même ; enfin la pratique arrête l’intellect sur le mot seul, vidé de son sens. Des actes mentaux de dix-huit espèces concourent à ce but. On tient alors le positif de l’idéal (dharmatattva), qui embrasse les trois essences ; l’imaginaire, qui est la dualité, le relatif qui est le signe (l’occasion) de la dualité, et l’absolu qui est ineffable, n’étant pas susceptible de multiplicité. Mais les idéaux eux-mêmes ne sont qu’un mirage. La dualité fondamentale réside dans la pensée, qui croit à la réalité des idéaux qu’elle se fabrique elle-même, et qui se dédouble en sujet et en objet (vijñaptimâtra). Pour ramener à l’unité les deux prétendus termes, il faut étudier leurs rapports logiques. La pensée, en prenant une conscience analytique de soi. se définit indirectement soit dans l’imaginaire, en tant que verbe, notification verbale et sens correspondant, soit dans le relatif, en tant que mot, corps, esprit, perception, etc., soit dans l’absolu, en tant que Quiddité. En fait, ces définitions indirectes supposent sous-entendue la notion des idéaux qui peut seule justifier une relation entre la pensée et ses définitions ; l’opération mentale qui introduit et explique ce lien est d’ordre mystique ; elle va de la dualité à l’unité en cinq étapes : elle restreint la causalité en réduisant l’effet à reproduire identiquement la cause ; elle ramène l’activité mentale au plus profond de l’esprit (yoniçomanasikâra) ; elle arrête la pensée sur son