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dres, qu’elles couvrent tous les lieux voisins et étouffent les bestiaux. Cette circonstance est confirmée par d’autres témoignages. L’auteur du Voyage d’Antoine Sherley à San-Iago et aux îles orientales, assure qu’en passant la nuit près de l’île de Fuégo, il tomba tant de cendres sur le vaisseau, que chacun pouvait écrire son nom avec le doigt sur toutes les parties du tillac. Owington observe qu’il sort du même lieu tant de pierres ponces, qu’on les voit nager sur la surface de la mer, et portées bien loin par les courans. Il en a vu jusqu’à San-Iago.

Les insulaires de Fuégo racontent, sur l’origine de ce phénomène, une fable qui ressemble parfaitement aux contes des Mille et une Nuits. Ils disent que les premiers habitans de l’île furent deux prêtres qui s’y étaient retirés pour passer le reste de leur vie dans la solitude. On ignore s’ils étaient minéralogistes, métallurgistes, alchimistes, ou sorciers ; mais, pendant leur séjour, ils trouvèrent une mine d’or, près de laquelle ils établirent leur demeure. Lorsqu’ils eurent amassé une quantité de ce précieux métal, ils perdirent le goût de la vie solitaire, et cherchèrent l’occasion d’un vaisseau pour se rendre en Europe : mais l’un des deux, qui s’attribuait quelque supériorité sur l’autre, se saisit de la meilleure partie du trésor, ce qui fit naître entre eux une querelle si vive, qu’ayant exercé tous leurs sortiléges, ils mirent l’île en feu, et périrent tous deux dans les flammes, qui étaient leur ouvrage. Cet incen-