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Page:La Motte-Fouqué - Ondine, Hachette, 1913.djvu/77

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tumé, que son épée sortait à demi de son fourreau, pour lui inspirer les mêmes pensées chevaleresques et lui reprocher son inaction. Il apaisait alors son âme inquiète en se disant qu’Ondine était certainement la fille de quelque haut seigneur de la région, et qu’avoir gagné son amour était déjà un beau fait d’armes.

Huldbrand n’aimait pas entendre la femme du pêcheur gronder Ondine en termes vulgaires et trop familiers ; mais comme Ondine était toujours la première à rire des reproches qui lui étaient ainsi adressés, et comme, d’autre part, l’espiègle enfant les méritait dans une large mesure, le chevalier ne pouvait pas en vouloir beaucoup à la vieille femme, et l’harmonie n’était jamais rompue le moins du monde dans la modeste mais heureuse petite cabane.

Quelque chose vint enfin varier un peu cette existence. Après le repas du soir, tout en devisant, le pêcheur et son hôte avaient pris l’habitude de vider ensemble un cruchon de vin, tant et si bien qu’un jour la provision s’en trouva épuisée, ce dont les deux hommes se montrèrent fort mécontents. Ondine s’amusa bien de la grimace qu’elle leur vit faire à ce sujet et les plaisanta sans pitié. Vers le soir de ce jour-là, elle sortit sous le prétexte de fuir ces visages maussades ; le temps se gâtait, l’orage menaçait, et les deux hommes, au souvenir des angoisses qu’ils avaient déjà connues en une circonstance semblable, s’apprêtaient à rappeler la jeune fille quand elle revint d’elle-même, l’air joyeux et frappant gaiement des mains.