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Page:Laisnel de La Salle - Croyances et légendes du centre de la France, Tome 1.djvu/114

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du vieux temps

que l’on dresse ainsi, toujours autant que possible sur une élévation, rappelle « le père-feu des Gaulois allumé, le premier mai, sur la montagne de la guerre[1] » ; elle rappelle encore « le Bel tan, ou feu du dieu Bel, que les Celtes d’Irlande, selon M. A. Pictet, allumaient, à la même époque, sur les montagnes, en l’honneur du soleil[2]. » On trouve aussi dans un autre chant du Barzaz-Breiz, le passage suivant : « Au sommet des Montagnes noires, la veille de la fête du bon Jean, trente paysans étaient réunis autour du feu de joie du père… » Enfin, c’est toujours par suite de ces vieilles traditions que, dans certains cantons de la Suisse, le sommet des glaciers resplendit, chaque année, des feux de la Saint-Jean.

Dans les hameaux, c’est le vieillard le plus avancé en âge de l’endroit qui met le feu à la jônée ; dans les bourgs, c’est ordinairement à M. le curé ou à M. le maire que cet honneur est dévolu. — On sait qu’à Paris, encore dans la dernière moitié du dix-septième siècle, ce privilége appartenait au roi en personne qui, chaque année, se rendait sur la place de Grève et allumait le feu de la Saint-Jean, après en avoir fait trois fois le tours[3].

À peine les fagots commencent-ils à pétiller et à se tordre sous l’étreinte des flammes, que tous les assistants, jeunes et vieux, se prennent par la main et se mettent à danser des rondes autour de la jônée. Les jeunes filles surtout se livrent à cet exercice avec beaucoup d’entrain ; car elles savent qu’en dansant ainsi autour des neuf feux de la Saint-Jean, elles se marieront infailliblement dans l’année. — Les danseurs ne s’arrêtent que pour activer, au moyen de longues perches, l’ardeur du brasier et en faire jaillir des jets de flammes et d’étincelles.

  1. Voy. le chant des séries du Barzaz-Breiz, p. 9, du t. I.
  2. Ibid.
  3. Voy. la Muse historique de Jean Loret.