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Page:Laisnel de La Salle - Croyances et légendes du centre de la France, Tome 1.djvu/320

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souvenirs du vieux temps

paysan berrichon sans ce dernier amulette. Comme la larve de ce coléoptère vit dans l’intérieur du chêne, cette circonstance est bien suffisante pour que les Gaulois nos pères se soient persuadé que cet insecte devait participer de la nature de l’arbre qui, au rapport de Maxime de Tyr, passait, parmi les tribus gaéliques, pour la Divinité suprême[1]. Ainsi s’expliquerait encore l’espèce de culte que les druides rendaient au gui de chêne, plante parasite qui, de même que la lucane, se nourrit de la substance de cet arbre. Notre assertion est d’ailleurs confirmée par Pline, qui dit positivement que les Gaulois « regardaient comme un présent du ciel tout ce qui naissait, tout ce qui croissait sur les chênes. Quidquid adnascatur illis e cœlo missum putant[2]. »

Nous remarquerons, à ce propos, que le chêne, si honoré dans les Gaules, fut aussi en grande vénération chez les Grecs, qui l’avaient consacré à Jupiter. Les Romains, sous ce rapport, partageaient leur manière de voir : Glandiferi maxime generis omnes, quibus honos apud Romanos perpetuus[3]. — Le chêne n’aurait-il pas été en aussi grand respect chez tous ces peuples, que parce que ses fruits passaient pour avoir servi de première nourriture à l’espèce humaine ? — « Nous faisons fi des glands du chêne, dit notre compatriote Jules Néraud, mais une très-vieille tradition nous apprend que les premiers hommes s’en régalaient très-bien… Du reste, en Espagne, en Italie, en Grèce, dans l’Asie Mineure, précisément dans les pays où la tradition place les anciens mangeurs de glands, on rencontre plusieurs espèces de chênes dont les fruits sont très-bons à manger. Les meilleurs sont ceux du chêne bellote, dont on fait le commerce en

  1. « Le Jupiter celtique est un grand chêne », dit Maxime de Tyr. — Voy. Jean Raynaud, l’Esprit de la Gaule, p. 28.
  2. Histoire naturelle, liv. XXVI, ch. 95.
  3. Ibidem, liv. XVI, ch. 2.