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Page:Langlois - Harivansa ou histoire de la famille de Hari, tome 1.djvu/101

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ces Pitris ont autrefois animé les corps des Dévas ; on les appelle Agnichwâttas, et leur influence est puissante.

De leur esprit est issue une fille : c’est la rivière Atchhodâ, qui a donné naissance au lac Atchhoda[1]. Elle n’avait point eu le bonheur de voir les auteurs de ses jours. Comment aurait-elle pu apercevoir des Pitris immatériels, qui ne l’avaient créée que par la force de leur pensée ? Honteuse de cette disgrâce, elle se choisit un père : c’était un Vasou, le glorieux Amâvasou[2], fils d’Ayous, qu’elle avait vu traverser le ciel sur un char avec l’Apsarâ Adricâ. Egarée par cette pensée, la belle vierge se met à la poursuite de ce père qu’elle adopte, et renonçant à ses exercices de dévotion, elle va errant dans l’espace. Dans sa course incertaine et vagabonde, elle aperçoit tout à coup trois chars aussi petits que des atomes, et sur ces chars trois Pitris presque insensibles : mais son œil les voit cependant sur ces chars merveilleux, brillant comme des feux placés sur d’autres feux. « Sauvez-moi, » leur dit-elle, faible et la tête baissée. « Ne crains rien, lui répondirent-ils, ô toi que nous trouvons égarée dans les plaines de l’air. » D’une voix timide, elle cherche à s’excuser auprès de ces Pitris, qui sont ses véritables pères. « Par ta faute, lui dirent-ils, tu as perdu le haut rang que tu occupais : pauvre enfant, au lieu d’avancer, tu as rétrogradé. Mais console-toi, les dieux recueillent ici le fruit des œuvres qu’ils ont accomplies, tandis qu’ils étaient revêtus d’un corps divin. Toujours les œuvres portent leurs fruits dans un autre monde, qu’elles aient été faites dans l’état d’homme ou de dieu. Ainsi, chère enfant, compte qu’en ces lieux mêmes tu trouveras le fruit de ta pénitence. » En entendant ces mots, la jeune vierge cherchait encore à se rendre ses Pitris toujours plus favorables. Ils entrèrent en méditation, et voyant l’avenir, ils lui dirent avec affection : « Ô vierge, tu seras la fille de ce roi Vasou, qui lui-même naîtra sur la terre parmi les mortels, et tu reviendras ensuite dans ce monde qui est le tien, et où il est difficile d’arriver. Tu auras pour fils le Brahmane, fils de Parâsara, qui divisera le Vède unique en quatre parties[3] : tu auras encore du grand roi Santanou deux fils qui feront ta gloire, le pieux Vit-

  1. Le lac Atchhoda se trouve sur l'Himâlaya, près du pic Tchandraprabha, d’où sort la Mandâkinî.
  2. Une partie de cette fable est astronomique : Amâvasou est le génie qui préside au jour de la nouvelle lune.
  3. Ce fils de Parâsara est Vyâsa, connu sous le surnom de Vêda-vyâsa, ou compilateur des